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 le bazar des maccabés. (lazare)

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Cleb Kapi
Cleb Kapi

REPRESENTATIVE SONG : RUB A DUB - FAUVE
IN THE POCKET : LE NUMÉRO DE TA MÈRE, CELUI DU VÉT. UNE PAGE, LÀ, CHIFFONNÉE DE LINGES POUR BÉBÉ. UN FOND DE TABAC HUMIDE. UN PORTABLE À LA VITRE FRACASSÉE, MERCI BB
PSEUDO : NEO (MEL)
CREDITS : RAMSEY
DOLLARS : 122

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MessageSujet: le bazar des maccabés. (lazare)   le bazar des maccabés. (lazare) EmptyMar 24 Sep - 20:03


Il y a ce son, là, en arrière plan ; l'éternel chant des sirènes de police qui englobe la ville, qui bouffe tout, là, sur son passage, et qui brûle les prunelles, de sa couleur trop vive. Il y a la mort, là, autour, toujours trop près, ou alors trop loin, sait-on jamais, qui danse sur un pas qu'elle seule comprend. La chaleur insupportable, partout autour de moi, la température qui monte et la sueur qui dégouline, lentement, alors que l'odeur se fait plus forte. L'odeur du sucre, de la mort, l'odeur des kilos en trop, et puis des ivrognes, tout autour, qui se noient dans l'alcool, et puis dans la gluten ensuite, pour changer le goût, sur le bout de leur langue. Il y a l'enfer, sous mes pas ; le gras contre le sol qui me fait glisser à chaque mouvement, et puis le tissus trop dérangeant, trop irritant, contre ma peau d'enfant. Le monde qui ne tourne pas rond, les égarés qui pensent changer le monde, là, au milieu de la nuit, en tête à tête avec un stupide donut fourré à la crème et puis du papier, et un crayon. Les regard tristes qui sont échangés, pendant une brève seconde, au comptoir, avant qu'ils ne me donnent le pourboire. Dieu se moque de nous, il rit à chaque ennui, observe attentivement, là, ce qui se passe, tout en bas. Rien ; il ne se passe rien, rien du tout, non, tout en bas. Qu'un gars trop con, au milieu de la nuit, qui sert des kilos en trop à des gens égarés ; que des jeunes qui ont trop fêtés et qui ne cessent de ricaner, là, au fond du fastfood; que des âmes en peine, là, tous abandonnés et éparpillés aux quatre coins de la pièce. Le monde fait pitié ; on fait tous pitié, au fond, à se cacher dans la nuit pour essayer d'oublier. Essayer de s'éloigner de la société, pour ne plus ressentir de préjugés, pour ne plus se sentir dénudés. Et pourtant, on est tous là, dans notre coin, à mater l'autre, discrètement, et puis se faire des idées. Dieu sait ce qu'ils peuvent bien penser, ces cons, à me dévisager. Dieu seul sait à quel point je peux faire pitié, moi aussi, de mon côté.

C'est ce qu'on est tous, au final ; une bande pitoyable, là, tous rassemblés. C'est un peu comme la réunion hebdomadaire, en fait. C'est un peu ça, oui, au fond. La crasse qui se dévoile, qui fond dans les cuisines, et qui glisse jusqu'à l'entrée. Faites attention où vous mettez les pieds;  vous pourriez tomber.

Les sirènes chantent de plus en plus fort, dans les rues, et puis les gens disparaissent, à les tables. La nuit devient moins sombre et la vie recommence, les voitures s'activent, un peu, dans les rues, et les coeurs reprennent leur rythme. C'est une fin et une naissance, quelque chose qui arrache le coeur pour le caresser délicatement, ensuite. Un sourire qui se calme, sur mes lèvres, alors que j'observe les minutes s'écouler, sur l'horloge pendue au mur. Les adolescents quittent les tables pour aller rejoindre leur lit, du moins quelques heures, avant le renouvellement des cours ; les ivrognes se réveillent et se lèvent, à leur tour, traînant leur carcasse pour retourner à la réalité. C'est triste, un peu, d'être ainsi abandonné. D'être délaissé alors qu'on est toujours là, toujours présent pour les écouter, ne serais-ce que pour leur commande, et puis veiller. Veiller deux trois secondes, juste assez, sur leur cadavre dénudé d'humanité, envahi par la solitude. Les observer aller et venir, encore, toujours, s'arrêtant ici quelques secondes, pour prendre un souffle, une bouchée surtout, et puis replonger, de nouveau. Replonger lorsque l'on sait, au fond, que l'on va se noyer. C'est ce qu'ils font tous, au fond;  c'est ce qu'on fait tous, jusqu'au moment où on finit par le toucher, le foutu fond.

Et puis, il y a toi. Toi, juste là. L'ombre qui se glisse toujours, souvent après le départ de chacun. L'homme au sourire en coin, l'ombre qui se dessine au levé du soleil, à l'aurore, lorsque l'herbe se fait humide. Un café et un donut, peu importe lequel, toujours un pointé au hasard, là, restant et abandonné au travers de la vitrine. Toujours ces deux billets, entre tes doigts, et puis les pièces qui tombent dans le pot à change. La gorge qui se noue et les mots qui restent verrouillés, alors que j'en viens à me détourner  ; j'ai des choses à nettoyer. La conversation est avortée avant même d'avoir commencé. La chaleur est affolante, suffocante, derrière le comptoir de service ; la grasse des plats dessine des contours étranges sur mes doigts alors que je les enfonce dans le lave vaisselle, les plaques de métal hurlent, un instant, lorsqu'ils se retrouvent brusquement enfermés dans le noir, se fracassant les unes contre les autres. Et puis, le silence encore. Le soleil qu se lève doucement, l'heure qui s'écoule trop lentement et juste toi, là, au fond. À la même table. Toujours la même foutue table, comme si elle était à toi ; quand le magasin fermera, tu l'emmèneras, j'imagine, avec toi. J'y graverais ton nom, une fois, enfin, quand je le connaîtrais. Quand je serais plus con, et puis que je m'en souviendrais.

Mes muscles hurlent de douleur, chantent leur malheur, alors que mes doigts s'enfoncent dans une lingette humide. Ma carcasse se traîne sur le plancher graisseux, mon corps se penche sur la table à côté de toi, pour la nettoyer. Je le fais jamais, pourtant ; c'est toujours comme ça, au fond, qu'on en vient à engager la conversation. Le signal de départ, j'imagine. « ça fait longtemps, d'puis la dernière fois. » Une phrase de merde, toujours, pour commencer. Mon regard figé sur toi qui en vient à se détourner, pour observer la propreté de cette foutue table dont j'ai rien à cirer. Les sourcils froncés, à force d'être concentré ; comme si j'le voulais vraiment, au fond, qu'elle soit bien astiquée, cette table à la con. Comme si j'en avais quelque chose à faire. Et puis la lingette qui s'écrase contre la table, loin de mes doigts, et mon cadavre qui se glisse sur la chaise, en face de toi. Les sirènes qui résonnent encore, quelque part, au loin, ou alors près, je sais pas. La casquette de merde qui s'dégage de mes cheveux et le filet qui suit le mouvement, alors que je me surprends à soupirer, à respirer, comme tous les autres qui sont passés, au cours de la nuit. Mes yeux qui dévient vers le donut, au travers de tes doigts, à défaut de croiser le tien. « t'aurais pas du prendre celui-là, il est vraiment à chier. en fait, j'pense même que j'l'ai échappé, c'lui-là, quand j'l'ai sorti du four » Le sourire, là, sur mes lèvres, lorsque je lève mes prunelles vers toi ; fatigués et moqueurs, ils t'observent avec un peu de stupeur, pourtant. J'attends le début de la conversation, je crois ; je balance toujours des trucs un peu cons, et puis toi, ensuite, les trucs un peu intelligents.
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Lazare Jones
Lazare Jones

REPRESENTATIVE SONG : ORCA – WINTERSLEEP.
IN THE POCKET : TON 06. UN BILLET DE CENT. DE LA COKE EN SACHET. UNE CAPOTE. UN CANIF.
PSEUDO : MORIARTY.
CREDITS : MORIARTY & TUMBLR.
DOLLARS : 55

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MessageSujet: Re: le bazar des maccabés. (lazare)   le bazar des maccabés. (lazare) EmptyMer 25 Sep - 1:02


J’ai quitté l’Enfer. J’ai quitté ses abymes et ses globes blancs qui m’observent avec lubricité. J’ai quitté les sales gueules et les beaux culs. J’ai quitté le parjure de l’innocence, sa ficelle de string avec. J’ai quitté Benjamin Franklin enclavé entre une paire de seins, l’encre de ses valeurs délavée à la sueur. J’ai quitté le Club.
Le mal de crâne zèbre ma tronche. C’est bon signe. Ça veut dire que j’ai bien bossé. Ça veut aussi dire que je n’suis plus si jeune, et que les verres de vodka, il va falloir les amputer de trois ou quatre gorgées, la prochaine fois. Ma trachée recrache une quinte de toux asphyxiée ; le genre déglinguée, au tabagisme agressif. J’en profite pour me sortir une tige que je tapote contre le paquet, l’air distrait ou assommé. Le cylindre du papier roulé glisse entre mon pouce et mon index tandis que mes pas foulent le macadam usé. La cité grise a comme tendance à s’embellir, à cette heure-ci. Ça doit tenir aux lueurs du soleil levant qui marivaude pendant quelques rares minutes avec les ombres de la nuit. C’est fascinant. Quasi magique. Concrètement, ça doit faire deux bonnes décennies que je n’lève plus le pif vers un tel tableau. Je braque mes pupilles dilatées vers mes deux mains. L’une griffe le briquet, l’autre couve la clope. Il est là, mon horizon. Planté pas plus loin que mon nez et mes besoins. Ma silhouette sombre marque un arrêt quasi brutal en plein milieu de la route. Mes réflexes psychomoteurs me disent merde ; que j’peux pas et m’acharner sur ma cibiche, et continuer mon périple. Ma volonté imbibée d’alcool reste sage, quasi sclérosée. A ma gauche jaillit une bagnole grisâtre, les feus encore allumés. Ses pneus crissent en me voyant et le moteur crachote en stationnant le tas de ferraille. Ça commence par des appels de phare. Un. Et puis deux. Je le devine bien ouais, le macaque qui s’excite derrière le volant. Un costume premier prix, des auréoles de sueur maculant déjà la chemise de la veille. Un petit sapin vert pendu au rétroviseur, histoire de camoufler la merde existentielle. Mes lippes se tordent comme un gamin devant un assemblage de Légo. J’en ai pas terminé avec mon affaire, il va falloir patienter. A mon insolence réplique le klaxon. Et vas-y que je m’acharne dessus, comme on ferait beugler une truie égorgée. Le temps se fige, boursoufflé par l’agitation à mes côtés. Si j’en ai quelque chose à foutre ? Je crois que c’est plutôt clair. La flamme finit par dévorer le tabac. J’inspire une bouffée et range tranquillement mon ustensile. Mes épaules vrillent et se dirigent vers les deux spots censés m’aveugler. J’imagine qu’il ne s’attendait pas vraiment à ça. Il a comme un air surpris. Débile. Penaud. Mais au fond, il m’en veut toujours, moi, l’instigateur acerbe de son retard. J’arrive près du capot et lève mon pied vers l’une des lumières. Le talon de ma godasse explose le verre et l’ampoule avec. Ça grésille. Ça carillonne sur le asphalte. « Ta gueule ! » j’lui crache d’un air féroce. Ça dénote avec ma dégaine de cadre ou d’impresario ; la chemise de marque, les pompes cirées, la boucle de ceinture argentée. Tout c’qui brille, pas vrai ? Sur la main qui lui fait un doigt, j’y ai même une putain de chevalière. Comme ça au moins c’est clair : ici c’est mon royaume, mes terres désolées. Devant leur seigneur, on courbe l’échine et on se la ferme. Sa monture se braque et finit par me contourner. Il galope à perdre haleine dans le fin fond de mes landes. C’est bien, gentil chien.
Mes semelles écrasent les résidus de quartz et j’continue ma traversée. Ça m’a redonné le sourire. Rictus que je garde en ouvrant la porte du fastfood. Ça pue, évidemment. Ce qui conforte mon appétit. J’y peux rien, j’ai toujours aimé les trucs crades. Les trucs indigestes. Je crois que mon estomac s’est calqué à mon éducation. Il est devenu un survivant vorace. Pas un chat. Quelques blattes, ouais, dans un coin que les néons blancs n’arrivent pas à éclaircir. Mais à part ça, j’ai la salle pour moi. J’suis mégalo ; donc ça me plait.
Et puis il y a cette tête. Cette tronche de pré-pubère sauvage, évadé dans la nuit. Il est occupé, il fait son boulot. Je lui décoche un long regard intrigué. Non vraiment. Ce môme m’a toujours troublé. Je n’le connais pas tellement. Pas vraiment. Mais j’y suis attaché. Un truc assez dissemblable du reste de ma vie. Un sentiment clandestin, étouffé dès que je sors de la bâtisse. J’en sais rien, c’est peut-être les vapeurs, la chaleur, l’humidité et les odeurs. Non mais regardez-moi cette loque. Un prince en haillons, traîné dans la glaise, la glaire du monde. Il donne envie de sortir son .45 et de lui en caler une dans la cervelle ; juste pour abréger ses souffrances. C’est la première fois que j’ai envie de crever quelqu’un par charité. On échange nos formalités commerciales et je pars à mon emplacement. Entendez bien — "mon" emplacement. Même principe que les trottoirs. Ça m’est déjà arrivé d’en choper un ou deux par les fringues et de leur demander gentiment de dégager. Ça s’appelle le sens du devoir. Surtout quand votre patrie tourne autour de votre égo. C’est une bonne table. Assez loin des cuisines pour ne pas renifler à pleins poumons le remugle des fourneaux. Pas trop près de l’entrée à cause des courants d’air – surtout en hiver. Il y a la baie vitrée tamponnée du slogan de la firme. Je peux mater la vie sans que les regards ne s’attardent sur ma gueule. J’esquive parfois les œillades extérieures entre deux lettres, comme un soldat derrière sa tranchée. En définitive, c’est l’idéal, surtout pour amadouer le chat de gouttières qui a bien mis des semaines entières avant de m’adresser le premier mot. J’imagine que si j’avais été tout au fond, il serait resté tapi entre sa graisse de cuisson et son produit vaisselle parfum citron frais. J’me mets à touiller dans ma tasse. Je sais qu’il va venir, et durant un laps de temps infime, ça devient presque ma raison de vivre. Mon regard le guigne. Chacun de ses mouvements est imprimé dans ma boîte crânienne. J’imagine que j’ai l’air d’un prédateur, alors que la seule chose qui traverse mon esprit c’est : un, ou deux sucres ? L’éternelle ambiguïté du regard vide.
Je décide de le prendre noir. La vodka ricane encore contre mes tempes. Après une ou deux gorgées je m’attaque au donut. Je n’sais même plus ce que j’ai pris, mais ça ne m’empêche pas de l’enfourner dans mon gosier.
Il est là. Il récure et j’ai envie de lui foutre mon pied au cul. Ici c’est un peu comme être au chenil. On les regarde tous derrière leurs cages. On s’dit qu’on les prendrait bien, qu’on s’en occuperait bien, mais bon, pas l’temps pour ça. Alors ça devient juste un spectacle. La Misère & plus si affinités, 1,90$ la séance. Il est fascinant, non ? Un véritable spécimen de laboratoire. Quatre mouvements de bras, rotation de la main, vertèbres pliées, attention éduquée. Je reste persuadé que dans cette carapace en uniforme, beugle à s’en exploser les cordes un clébard enragé. « ça fait longtemps, d'puis la dernière fois. » Je n’réponds pas. Je mâche comme un ruminant et je continue de l’épier. J’vais pas lui faire ce plaisir. Je veux qu’il vienne là, devant moi, qu’il pose ses fesses et qu’il fasse semblant de vivre. J’suis pas conventionnel. Antisocial et mal éduqué. Il finit par se caler droit devant mes mirettes. L’air cancéreux, stade terminal. « t'aurais pas du prendre celui-là, il est vraiment à chier. en fait, j'pense même que j'l'ai échappé, c'lui-là, quand j'l'ai sorti du four » J’arrête ma mastication. « Pu—tain. » Je secoue lourdement ma tignasse. Je n’sais pas si c’est son humour pourri ou une vérité affligeante, mais c’est trop tard, l’idée est implantée dans ma matière grise comme une suggestion d’hypnotiseur véreux. Je lance un mouvement de main, désabusé. Mais je continue pourtant d’engloutir ma pitance, et sans finir d’avaler, j’hausse les sourcils. « J’ai fourré ma langue dans bien pire. » C’est un aveu qui me dégrafe un sourire sale. Je jette un coup d’œil par la vitre, déconcentré par des voix. Je reconnais un client du club et l’une de mes filles. C’est rassurant de savoir qu’on trime à côté pour me payer des donuts encrassés trois fois par semaine. J’en reviens à sa carcasse et le pointe d’un index huilé, entaché de sucre glace. « T’as une sale gueule. » Ça arrive comme un précepte. Je me devais de le dire. De le notifier à voix haute et d’insister comme un con avec ma gestuelle intrusive. Comme ça au moins, les amabilités sont échangées en bonne et due forme. « Me fais pas chier, de toute façon, c’était le dernier. » de donut. J’me sens obligé de justifier et je fais passer le tout avec une nouvelle gorgée de café. « Tu vas pas m’dire que t'as craché là-dedans aussi … ? » Je remue la tasse sous nos pifs, pas franchement inquiet, avant de conclure par un vague ricanement mécanique. « J’t’en voudrais pas. J’ai longtemps assaisonné la gnôle de mon vieux avec des mollards. On pourrait appeler ça le karma. » Je vais de confessions en confessions. Aussi alléchantes les unes que les autres, mais mon existence entière est lubrifiée par des obscénités. Chacun sa richesse. Je finis par m’étirer. Ma colonne craque, suivie de mes omoplates, et mon dos rencontre la surface dure et inconfortable du dossier. Bras distendus, je laisse mes poings sur la table et le dévisage de longues secondes. « Pourquoi tu bosses ici ? Le fric, ouais, okay. Mais du flouze tu peux t’en faire partout ailleurs. Je sais pas comment te dire ça, mais bordel, tu fais pitié. » Je n’mâche pas mes mots. Je n’l’ai jamais fait. Mais la manière dont je le regarde fait penser à un grand frère révolté.  
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Cleb Kapi
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MessageSujet: Re: le bazar des maccabés. (lazare)   le bazar des maccabés. (lazare) EmptyJeu 3 Oct - 17:10


C'est marrant, mine de rien, notre histoire ; enfin, si une chose aussi dénudée de sens et terne peut être nommée ainsi. Au fond, on est que deux cadavres, sauf que toi, tu portes des vêtements de marque. Que deux macchabées qui s'observent dans les yeux, fascinés de faire face à un mort vivant, pourrissant l'un comme l'autre sans réellement y porter attention. On attend juste la fin ; laquelle ? Aucune idée. La fin qu'on va peut-être réaliser, au final, ou alors, qui va nous dégriser. Quelque chose de grand, de fort peut-être, pour nous réveiller. Pour le moment, on se contente d'être mort. D'être mort, là, à s'observer dans les yeux dans un fastfood pourri qui empeste le gras et les regrets oubliés. Les regrets baignés dans le café un peu trop froid, délaissé par les lèvres gercés, et puis les restes de donuts qui meurent dans les poubelles, dévorés par les fourmis un peu trop déterminées. On fait tache, un peu, au milieu de tout ça. Le môme qui souhaitait intégrer la Juilliard et puis le vieux qui est là, juste là, avec ses airs de riche et son haleine d'alcoolisé. On fait un peu pitié, non, au milieu des autres morts ? Comme si on était encore dans la pente, dans l'escalier qui nous mène à la cave, et qu'on parvenait pas, non, à l'ouvrir, cette foutue porte. On est juste là, à s'observer dans les yeux, comme si on attendait le signal de départ, comme si j'attendais quelque chose, au fond, de ta part. C'est un peu con, au fond. C'est foutrement con, oui, au fond.

N'empêche que pourtant, on est là. Je suis là, comme à chaque fois, les yeux rivés sur toi. Le chant de brooklyn commence à se lever, doucement, dehors, pour annoncer le réveil à ceux qui osent vivre. Aucun chant de coq, ici. Aucune mélodie, aucun chant de sirène doux, pour nous porter. Que des cris de sirènes bien fort, que des vendeurs, dans les rues, devant leur boutique, qui commencent la journée en se balançant des insultes. Les hurlements des chats, dans les ruelles, qui se font brusquement réveiller par les chiens errants. Mon regard se tourne pas vers l'extérieur, pourtant. Il reste là, bas, comme mon corps courbé à moitié, alors que je suis là, con et grand, à t'observer. Comme si j'attendais quelque chose. N'importe quoi, surement un truc con, me connaissant.  « Pu—tain. » J'en viens à chercher, un instant, où elle peut bien être, cette putain. Comme si j'avais envie de voir une chute de rein et des faux seins ; j'le sais peut-être, au fond, que tu fais juste réagir à ma phrase. Elle est juste loin, maintenant, dans mes pensées. Dans mes souvenirs. Il est fin, le sourire qui prend place sur mes lèvres, alors que je t'observe. Ma réplique passée résonne dans mes pensées alors que je te dévisage, amusé par ma propre bêtise. Peut-être que j'essaie de t'énerver ; aucune idée, j'ai le cerveau bien trop englouti pour le réaliser. « J’ai fourré ma langue dans bien pire. » Une grimace prend forme sur mes traits, comme une tempête en pleine mer, alors qu'un sourire orne tes lèvres. « sois gentil ; épargne moi les images mentales. » Mes prunelles se tournent vers une cliente, au fond, comme si elle était là pour garnir le tout, être le cerise, sur le gâteau. La graisse semble encore plus gigantesque que celle qui traîne dans les cuisines, et ses jambes, armées de montagne russe multiples, de courbes loufoques et certainement pas ferme, dansent sous chacun  de ses mouvements. Une grimace encore plus grande déforme mes traits, alors qu'un goût amer, celle de la bile, se glisse contre ma gorge ; je détourne les yeux subitement, le coeur sensible, un raclement de gorge me prenant. Plus jamais ; plus jamais, les images mentales.

Ton foutu doigt dégoulinant de gras est pointé vers moi, quand je t'observe de nouveau ; quand je dévisage tes traits, sans réellement te voir, au fond. « T’as une sale gueule. » Un rire me prend. T'es bien marrant, cette fois. Il est terne, vide et bas, le rire, un peu comme une sentence, une mort qu'on ne peut fuir, une fatalité. J'ai une sale gueule. Je l'ai depuis longtemps, cette sale gueule. Un jour, elle s'est pointée, et depuis, elle peut pas s'empêcher de squatter. C'est comme ça, juste comme ça. C'pas tes paroles qui vont y changer quoique ce soit. « Tu vas pas m’dire que t'as craché là-dedans aussi … ? » C'est fou, quand même, à quel point mes pensées s'évadent, à quel point j'pars loin, alors qu'au fond, j'suis prisonnier dans une cage. Dans une foutue cage qui pue l'donut et l'café froid, avec toi. « hm ? » Le nez se lève, presque plongé dans le foutu café qui danse, là, entre nous deux, et puis j'croise encore ton regard bleu et moqueur ; on dirait un peu un regard de vainqueur. « J’t’en voudrais pas. J’ai longtemps assaisonné la gnôle de mon vieux avec des mollards. On pourrait appeler ça le karma. » Haussement de sourcils ; j'y comprends rien, au fond, à toutes ces confessions. J'ai juste la mort à mes trousses et puis la fatigue au fond des tripes. Juste l'envie de faire la conversation, au fond, qui s'en va un peu, aussi lentement qu'elle est venue, au fond. « la mort aux rats te dérange pas, alors? tant mieux, la boite a fendu et l'tout s'est renversé dans l'café. » J't'observe, là, silencieux. On dirait que j'fais que ça, comme un maniaque, comme un drogué d'la came qui a senti l'odeur, sur toi. C'est p'être le cas, au fond. Je sais pas ; j'ai pas envie de savoir, ouais. « Pourquoi tu bosses ici ? Le fric, ouais, okay. Mais du flouze tu peux t’en faire partout ailleurs. Je sais pas comment te dire ça, mais bordel, tu fais pitié. » C'est fou, quand même. À quel point les jugements claquent contre la gueule, quand on se les prend comme ça. À quel point un foutu sourire peut laisser place à un froncement de sourcil. L'jugement des gens, la foutue place qu'ils s'permettent de prendre, comme ça, brusquement, juste car ils jugent bon de partager leur avis. « t'as fini, c'est bon ? » J'en ai rien à foutre, sérieusement. De ton avis de merde, de ta vie et puis de ton fric. J'en ai rien à foutre;  non, j'ai les nerfs à vif, et puis t'as foutu le doigts où il fallait pas. Je grogne et je crache, c'est juste comme ça. Les pattes de la chaise grincent contre le sol, alors que j'me redresse brusquement. J'ai les mains sur la table, pourtant, pour t'observer dans les yeux. Y'a surement la grosse, au fond, qui a tourné ses yeux vers nous, et puis son double menton qui tremble encore, à cause du mouvement qui a nécessité tant d'efforts. « j'fais pitié ? tant mieux, ça m'va. ça m'va bien au teint, faire pitié. ça fait mouiller les meufs, tu verrais. » Mes doigts se crispent de nouveau contre la lingette, et je me mets à nettoyer la table, de nouveau. À voir avec quelle force je l'astique, on pourrait bien croire que j'ai envie de la casser en deux. « mon gars, t'es là pour ton café, et puis un donut qui va boucher tes artères, un jour. t'es pas là pour jouer l'gars gentil, ou j'sais pas quoi. ma vie, elle te concerne pas. » Je balance la lingette sur mon épaule, malgré l'eau et la crasse qui en dégouline, en me redressant. J'fais bien petit, mine de rien, face à toi, alors que t'es toujours assis. J'fais bien minable, lorsque c'est toi, pourtant, qui a les yeux vitreux, entre nous deux. Peu importe ; j'en ai rien à battre.

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